Le centre du monde

Nous sommes les nombrils de notre propre monde, tout ce que nous créons, expérimentons, vivons, nous le faisons à jamais pour nous-même. Nous sommes les seuls à pouvoir guérir notre intérieur, nous sommes les seuls à savoir où nous allons, nous sommes les seuls à.... les seuls... seuls... tel un écho tout revient à nous.

Nous agissons par rapport à nous-même et il ne peut en être autrement puisque nous vivons dans le monde de notre propre création.

Lorsque je tente d'influencer quelqu'un, je ne le fais pas pour son bien même si je le pense très fort, je le fais bien souvent pour moi-même :

- Par exemple, si je demande à mon enfant de bien travailler à l'école, en apparence on peut penser que c'est pour son bien-être, pour son avenir, mais c'est aussi pour moi-même, pour me rassurer et apaiser mes angoisses quant à l'avenir. Bien entendu je le fais parce que je considère que c'est mieux pour lui, mais au final ce qui est le mieux pour lui l'est pour moi également.

- Un autre exemple, si je souhaite que mon compagnon fasse attention sur la route lorsqu'il conduit, je lui recommande la prudence car s'il lui arrivait malheur je me retrouverais seule. Evidemment je serais horriblement peinée en pensant à tout ce qu'il ne vivra plus jamais, mais, je ne peux ignorer ma douleur de vivre sans lui, d'accepter son absence.

- Ou encore un exemple plus léger, si je ne souhaite pas que ma sœur se colore les cheveux en bleu, j'argumenterais en affirmant qu'elle ne trouvera pas de travail ainsi et que cela m’inquiète, mais, en réalité, c'est pour moi que je m'inquiète, pour mon image car je serais la sœur d'une fille aux cheveux bleus.

Contrôler, influencer, juger sert à nous rassurer avant tout. Cela met en lumière nos propres peurs, nos blessures, car nous vivons à travers nos filtres personnels. Est-ce la peur de déplaire ? l'angoisse de la solitude ? la crainte face à l'avenir ? Lorsque nous tentons de contrôler cela démontre une non acceptation, il est donc bon de travailler à lâcher-prise.

Nous sommes également le nombril de ce qui semble être bien éloigné de nous. En effet, lorsque je regarde les nouvelles du jour et y vois des personnes tuées dans des guerres infernales, j'ai mal. J'éprouve beaucoup de peine pour ces personnes mortes dans de si horribles conditions, je me sens déchirée intérieurement car cette souffrance extérieure fait écho en moi. C'est ce que l'on appelle avoir de l'empathie.

C'est pour cela que le sentiment le plus douloureux est celui de l'impuissance. Lorsque l'on se sent impuissant cela signifie que l'on ne peut changer une situation extérieure et cela affecte fortement notre intérieur. Alors, travailler à basculer de l'empathie à la compassion peut être bénéfique.

De la plus simple expérience à la plus difficile, nous agissons toujours par et pour nous-même. Bien sur, nous réagissons ainsi car nous ne voulons pas que l'autre souffre, mais, nous ne voulons pas qu'il souffre car cela affecte également notre intérieur. Nous puisons et nous abreuvons éternellement à notre propre source, que ce soit source de bonheur ou de souffrance.

Ceci est également vrai pour les expérience dites "lumineuses" :

- Si je croise une personne en détresse, je lui viendrais en aide dans la mesure du possible, et si je parviens à débloquer sa situation je serais heureuse d'y avoir contribué. L'aider m'aide avant tout.

- Si je réussis à redonner le sourire à une amie qui se sent mal, je serais apaisée pour mon amie mais aussi pour moi-même, car mon intervention soigne mes propres angoisses de savoir mon amie malheureuse.

- Lorsque je fais un énorme câlin à mon bébé, je lui envoie une merveilleuse dose d'amour et par la même occasion je fais un bien incommensurable à mon cœur.

Faire plaisir à l'autre me fait plaisir, avant toute chose. C'est la notion de donner/recevoir.

Il en est de même pour nos relations amoureuses, bien souvent nous cherchons l'amour extérieur pour guérir notre intérieur. Lorsque nous recherchons une relation pour panser nos blessures c'est un amour sous conditions. A contrario si nous nous sentons déjà entier et que nous sommes en couple sans besoins ni attentes, cela devient un amour inconditionnel. Dans la première option nous attendons quelque chose de l'autre, donc nous agissons pour nous-même; dans l'amour inconditionnel nous aimons sans rien demander en retour et cela nous enchante, nous procure de la joie. Et dans ces deux cas tout revient à nous-même.

Ainsi, dans tout ce que nous faisons nous agissons aussi et avant tout pour nous-même, même si l'on refuse parfois de l'admettre. L'on peut alors dire que moi-même devient moi m'aime. Et ce n'est ni bien ni mal, cela ne fait pas de nous des êtres égoïstes, c'est simplement ce qui est, nous sommes et resterons à jamais le centre de notre propre monde. Tel un centre de gravité autour duquel tout transite.

Dans ces conditions on peut se demander quelle est la place de l'Unité ? Si tout ce qui se passe ne concerne que soi-même comment peut-on ne former qu'Un ?

A cela je réponds que le malheur des uns est notre propre malheur puisque nous souffrons lorsque l'autre souffre, l'unité se ressent. Si je suis heureuse quand mes proches le sont, l'unité est évidente. Nous expérimentons à travers l'autre, l'autre nous guide vers notre source intérieure, l'autre nous aide à vivre nos émotions, l'autre nous permet de panser nos blessures en les pointant du doigt. Les échanges avec autrui sont nos plus beaux outils d'évolution car ils permettent de se connaitre intérieurement.

Ce que vit l'autre est ce que je vis, puisque tout se rapporte à moi-même.

 

Emilie Dedieu