La source de la peur

Nous parlons souvent des deux pensées racines "peur" et "amour", desquelles émane un large éventail d'émotions. En effet, la peur est à mettre en parallèle avec nos émotions négatives, tandis que l'amour donne naissance aux émotions positives. Seules ces deux pensées racines existent, elles sont la source de tout, les autres émotions ne sont que des petits ruisseaux qui prennent vie en ces deux sources.

Pour une vie sereine et agréable il est préférable de se rapprocher de l'amour qui est un état d'être et qui prend source dans le cœur. La peur quant à elle est un état de lutte qui prend source dans l'ego. Nous vacillons sans cesse entre ces deux états, entre la souffrance et le bonheur, car nous éprouvons des difficultés à nous maintenir dans l'amour. Pourquoi ? Pour répondre à cette question nous devons plonger dans l'eau tourmentée de la peur.

Qu'est-ce que la peur ? Nous en connaissons les effets, nous voyons les émotions qu'elle fait naître en nous, nous remarquons les comportements qu'elle nous pousse à adopter, mais qui est-elle vraiment ?

La seule et unique eau qui alimente sa source est la croyance en la "séparation".

Toute peur provient d'un sentiment de séparation, qu'elle soit réelle ou imaginaire. En effet, nous sommes anxieux à l'idée de perdre quelque chose ou quelqu'un (amour, proche, emploi, argent, biens...), ou alors, nous sommes triste en pensant à ce que l'on a déjà perdu (jeunesse, amour, santé, mode de vie, notoriété, liberté...). Que ce soit lié au futur ou au passé, au regret ou à l'angoisse, la souffrance découle de la séparation.

Lorsque nous sommes confus/culpabilisons/avons honte... , de quelque chose, notre mal être provient de cet état de se sentir séparé de notre cœur.

Lorsque nous sommes en colère/triste/jaloux... , notre souffrance provient du sentiment d'être séparé du reste. Et ainsi de suite.

Ces peurs font parfois de nous des personnes étouffantes, manipulatrices, stressées, colériques, soumises, autoritaires... Car tous ces masques sont une manière de contrôler donc de garder (l'autre, le bien, la sécurité...).

Nous avons donc peur de perdre ce que l'on possède, mais, à cela s'ajoute la peur de ce qui semble être déjà séparé de nous : les autres, les us et coutumes d'ailleurs, les points de vue différents, les croyances opposées...

Ainsi, toute souffrance, toute peur, résulte d'une séparation. Perdre ce que l'on aime, ce qui nous rassure, ce qui fait notre quotidien, ce qui fait notre Vie. Peur de ce qui nous sépare, ce que l'on ne connaît pas, ce que l'on craint. La séparation est la peur ultime qui nous ronge de l'intérieur car nous sommes d'office destinés à perdre ce que l'on a puisque dans la matière tout n'est qu'éphémère. Nos proches disparaitront, nos biens disparaitront, tout ce que l'on a disparaitra car nous mourrons un jour.

Cette peur qu'est la séparation est la preuve que nous sommes tous liés, et qu'il n'est pas naturel de diviser cette unité puisque cela génère de la souffrance et d'autres émotions négatives. En effet, nous savons intuitivement que nous formons tous une même et grande énergie, mais, cette unité ayant des difficultés à se voir et se ressentir ici bas, à se vivre dans la matière, nous tentons de la recréer en nous accrochant obstinément à ce que l'on a dans notre vie (amis, famille, emploi, biens...) avec l'espoir de recréer cette unité qui semble perdue, tout cela pour mettre fin à la souffrance d'être séparé du grand tout. Cela va même encore plus loin, avec des sentiments d'appartenances qui nous rassurent tels que : même sexe, même pays, même religion, mêmes hobbies, mêmes goûts... Toutes ces cases dans lesquelles nous rentrons volontiers donnent l'illusion que nous sommes liés, proches. Même si au final cela ne fait que nous séparer les uns des autres, l'illusion semble fonctionner car elle rapproche des petits groupes de personnes entre elles, mais, elle en écarte finalement les autres. Ainsi nous nous séparons des uns pour nous rapprocher des autres, nous tentons maladroitement de nous réunir en nous détachant du reste, et au final que d'insatisfactions !

Cela est dans la nature humaine de s'accrocher, de résister, de lutter, de refuser de perdre, car perdre signifie se séparer. Ceci explique les difficultés que l'on a à perdre nos automatismes et croyances, à s'éloigner des personnes toxiques, à changer nos angles de vue, ou même à perdre du poids, ou encore perdre une partie de cartes tout simplement. On préfère parfois s'accrocher à ce qui nous fait mal plutôt que nous en séparer, tant la souffrance liée à la séparation nous hante.

Pour mettre fin à la peur et se rapprocher de l'amour il faut donc détruire la base sur laquelle se construit cette pensée racine peur : le sentiment de séparation. Seul celui qui accepte de tout perdre peut être réellement heureux, et seul celui qui sait que nous sommes tous reliés accepte de tout perdre. Cette pensée est la bonne approche. En effet, une même et grande énergie nous anime tous, lorsque nous perdons notre emploi nous transformons simplement notre expérience, lorsque nous nous éloignons de quelqu'un c'est pour nous rapprocher de quelqu'un d'autre... Tout n'est que transformation car rien ne disparaît alors rien ne peut se perdre réellement, ainsi est l'unité. Les initiations liées à la séparation sont les plus douloureuses, mais elles permettent d'apprivoiser notre peur la plus grande, donc de grandir en nous libérant de nos chaînes.

N'oublions jamais que nous ne perdons jamais rien, nous transformons l'expérience. Si je perds mon porte-monnaie, un autre le trouvera; si je perds mon appartement, un autre y habitera; si ma voiture est détruite, une autre la remplacera; si je suis malade, je peux accueillir la santé; si je signe un contrat en or, d'autres seront passés à côté... Que ces expériences se vivent dans le bonheur ou le malheur, elles nous lient et nous relient sans cesse aux autres et à nous-même, car elles ne sont que des transformations, des changements. Nous pouvons donc tout perdre, puisque rien n'est vraiment perdu. 

 

Emilie Dedieu